Aller au contenu

Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/436

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

contre Athènes, qu’en vue de favoriser la passion de son fils. Quand il mit tant de zèle à défendre Phœbidas, qui avait violé la paix faite avec les Thébains, il le fit évidemment en faveur du crime même. En somme, tous les maux que Pompée fut accusé d’avoir fait aux Romains par mauvaise honte ou ignorance, Agésilas les fit aux Lacédémoniens par colère et par opiniâtreté, quand il alluma la guerre contre les Thébains.

S’il faut attribuer à la Fortune les fautes de nos deux héros, on conviendra que les Romains ne devaient pas s’attendre à celles de Pompée, et qu’Agésilas ne permit pas aux Lacédémoniens d’éviter celles dont les menaçait ce règne boiteux, contre lequel ils avaient été prévenus. En effet, Léotychidas eût-il été mille fois convaincu de n’être qu’un étranger et un bâtard, la famille des Eurytionides n’était pas embarrassée pour fournir à Sparte un roi légitime et ferme sur ses deux pieds, si Lysandre n’eût jeté, pour favoriser Agésilas, de l’obscurité sur le sens de l’oracle. Le remède qu’Agésilas suggéra après la défaite de Leuctres, en conseillant aux Spartiates, qui ne savaient quelle punition infliger aux fuyards, de laisser dormir les lois ce jour-là, est une invention politique dont il n’y a pas d’exemple, et à laquelle rien ne ressemble dans la vie de Pompée. Au contraire de Pompée, qui, pour montrer à ses amis toute l’étendue de son pouvoir, viola les lois qu’il avait lui-même établies, Agésilas, réduit à la nécessité de violer les lois pour sauver ses concitoyens, trouva moyen de conserver les lois sans sévir contre les coupables. Je mets encore au nombre des vertus politiques d’Agésilas cette preuve incomparable de soumission qu’il donne aux éphores : dès qu’il a reçu la scytale, il abandonne ses conquêtes en Asie. Et, tandis que Pompée ne rendit à la république d’autres services que ceux qui s’accordaient avec les intérêts de sa propre grandeur, Agésilas, par dévouement à la