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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/443

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ancienneté, à cette fureur divine qui transportes les adeptes du culte d’Orphée et de Bacchus : d’où leur vient leur nom de Clodones et de Mimallones ; elles ont à peu près les mêmes pratiques que les Édoniennes, et ces Thraciennes, voisines du mont Hémus, qui nous ont fait inventer, c’est du moins mon avis, l’expression thraciser[1], par laquelle nous désignons la pratique de cérémonies outrées et superstitieuses. Olympias, plus adonnée que les autres même à ces superstitions, et qui relevait encore ce fanatisme par un appareil tout barbare, traînait souvent après elle, dans les chœurs de danses, des serpents apprivoisés, qui se glissaient hors du lierre et des vans mystiques[2]), s’entortillaient autour des thyrses de ces femmes, s’entrelaçaient à leurs couronnes, et jetaient l’effroi parmi les assistants.

Quoi qu’il en soit, Philippe envoya Chéron de Mégalopolis consulter l’oracle de Delphes sur le songe qu’il avait eu ; et Chéron rapporta, dit-on, pour réponse, qu’Apollon lui commandait de sacrifier à Ammon, et d’honorer particulièrement ce dieu. On ajoute qu’il perdit un de ses yeux, qu’il avait mis au trou de la porte d’où il avait vu Jupiter couché auprès de sa femme, sous la forme d’un serpent. Olympias, au rapport d’Ératosthène, découvrit au seul Alexandre, lorsqu’il partit pour l’expédition, le secret de sa naissance, et l’exhorta à montrer des sentiments dignes d’une telle origine. D’autres, au contraire, prétendent qu’elle rejetait bien loin ces contes, et qu’elle disait : « Alexandre ne cessera-t-il pas de me calomnier auprès de Junon  ? »

  1. Θρησκεύειν, faire comme les Thraces.
  2. On se servait du van dans les sacrifices de Bacchus : c’était le symbole de la purification de l’âme : mystica vannus laccho.