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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/446

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il était d’une grande agilité : « Je m’y présenterais, dit-il, si je devais avoir des rois pour antagonistes. » En général, on le voit montrer de l’éloignement pour la race des athlètes ; puisque aussi bien lui qui proposa si souvent des prix à disputer entre les poètes tragiques, ou les joueurs de flûte et de lyre, ou même les rhapsodes[1] ; lui qui donna des combats de toute espèce d’animaux, et de lutteurs armés de bâtons, jamais il ne fit exécuter, du moins avec plaisir, les exercices du pugilat et du pancrace[2].

Il reçut un jour des ambassadeurs du roi de Perse, pendant que Philippe était absent : il leur fit bonne chère, et les charma par sa politesse et par ses questions, qui n’avaient rien d’enfantin ni de frivole : il s’informait de la distance où la Macédoine était de la Perse, et des chemins qui conduisaient aux provinces de la Haute-Asie ; il demandait comment le roi se comportait à la guerre, et quelles étaient la force et la puissance des Perses. Ce fut au point que les ambassadeurs émerveillés s’en allèrent convaincus que la tant vantée habileté de Philippe, n’était rien en comparaison de la vivacité d’esprit et des grandes vues de son fils. Aussi, toutes les fois qu’on annonçait que Philippe avait pris quelque ville considérable, ou avait remporté quelque mémorable victoire, Alexandre, loin d’en montrer de la joie, disait aux enfants de son âge : « Mes amis, mon père prendra tout ; il ne me laissera rien de grand et de glorieux à faire un jour avec vous. » Passionné, comme il l’était, non pour la volupté et la richesse, mais pour la vertu et la gloire, il pensait que, plus l’empire qu’il hériterait

  1. On appelait ainsi ceux qui chantaient les poèmes d’Homère, et, par extension, tous ceux qui récitaient sur les places publiques des vers d’auteurs célèbres.
  2. Ce mot, qui signifie victoire dans tous les genres, comprenait plusieurs des exercices ordinaires des athlètes.