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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/647

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conseils utiles ; tandis que, si je trahis ses intérêts, il le fera avec justice. » Voyant que les Athéniens ne se rendaient pas à ses avis, et qu’ils déclamaient sans cesse contre lui, il fit publier par un héraut, que tous les citoyens depuis l’âge de quatorze ans jusqu’à soixante, se munissent de pain pour cinq jours, et le suivissent au sortir de l’assemblée. Cette proclamation mit le trouble dans la ville, et les vieillards s’en plaignirent hautement. « Qu’y a-t-il donc de si terrible dans cet ordre ? leur dit Phocion : et moi qui ai quatre-vingts ans, ne serai-je pas à votre tête ? » Cette réponse les calma, et ils renoncèrent à faire la guerre.

Quelque temps après, Phocion, ayant appris que Micion, avec un grand nombre de Macédoniens et d’étrangers, après avoir ravagé toute la côte, s’était avancé jusqu’à Rhamnuse[1] et pillait tout le pays, fit marcher les Athéniens contre lui. Là, tous s’empressent autour de Phocion, veulent lui donner des conseils et trancher du général : l’un dit qu’il faut occuper telle colline ; un autre prétend que la cavalerie doit être envoyée dans tel endroit ; un troisième fixe le lieu où il serait à propos de camper. « Grands dieux ! s’écria Phocion, que de capitaines je vois ici, et combien peu de soldats ! » Quand il eut rangé son armée en bataille, un des fantassins sortit hors des rangs ; mais, un des ennemis s’étant avancé de son côté, la peur le prit, et il alla reprendre sa place. « Jeune homme, lui dit alors Phocion, n’es-tu pas honteux d’avoir abandonné deux postes en un seul jour : d’abord celui que t’avait assigné ton général, et ensuite celui que tu avais pris toi-même ? » Après quoi, chargeant les ennemis, il les enfonce, les met en fuite, et tue Micion leur chef avec un grand nombre des siens.

Cependant l’armée des Grecs confédérés gagna, dans

  1. Un des dèmes de l’Attique.