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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/699

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Sénat, se joignirent à lui en grand nombre, indignées de l’étrange conduite de César ; car les propositions faites par les plus insolents et les plus séditieux tribuns dans la vue de plaire au peuple, César les appuyait de son pouvoir consulaire, s’insinuant ainsi honteusement et bassement dans les bonnes grâces de la multitude.

Effrayés de cette résistance, César et Pompée eurent recours à la violence, et commencèrent par faire insulter Bibulus : comme il se rendait au Forum, on lui répandit sur la tête un panier d’ordures ; ensuite, la populace, s’étant jetée sur ses licteurs, mit les faisceaux en pièces ; on fit pleuvoir enfin dans la place une grêle de pierres et de traits : plusieurs personnes furent blessées, et tous les autres prirent la fuite. Caton se retira le dernier, marchant à pas lents, tournant souvent la tête, et maudissant de pareils citoyens.

César et Pompée ne se bornèrent point à faire passer la loi : ils firent décréter que le Sénat la confirmerait, et qu’il jurerait de la maintenir et de la défendre, en cas qu’on essayât d’y former opposition ; et l’on porta des peines sévères contre ceux qui refuseraient le serment. Tous les sénateurs jurèrent par nécessité, se souvenant de ce qui était arrivé à l’ancien Métellus, lequel, n’ayant pas voulu prêter le serment pour une loi semblable, fut banni de l’Italie, sans que le peuple s’en mit aucunement eu souci. La femme et les sœurs de Caton, les larmes aux yeux, le conjuraient de céder, et de prêter le serment ; ses parents et ses amis lui faisaient aussi de vives instances ; mais l’homme qui réussit le mieux par ses représentations et ses conseils à emporter son assentiment, ce fut l’orateur Cicéron. « Il n’est pas bien sûr, disait Cicéron, que ce soit chose juste de résister seul à ce qui a été généralement, résolu ; mais, de s’exposer à un péril évident pour changer ce qui est déjà fait, et de tenter l’impossible, ce serait vraiment sottise et démence. Le dernier