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Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/76

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LUCULLUS.

dès qu’il serait près de l’ennemi, et d’attendre qu’on l’informât que les retranchements étaient achevés. Sextilius comptait exécuter cet ordre ; mais, forcé par les insolentes provocations de Mithrobarzanès, il en vint aux mains. Mithrobarzanès périt dans le combat, en luttant avec courage ; ses troupes, mises en déroute, furent taillées en pièces, à l’exception d’un petit nombre de soldats.

À cette nouvelle, Tigrane abandonna Tigranocertes[1], ville très-considérable qu’il avait bâtie lui-même : il se retira vers le mont Taurus, où il rassembla toutes ses forces. Lucullus ne lui laissa pas le temps de faire ses préparatifs : il envoya Muréna couper les troupes qui rejoignaient Tigrane, tandis que Sextilius allait arrêter un corps nombreux d’Arabes qui se rendaient auprès du roi. Muréna se mit à la poursuite de Tigrane, et, saisissant le moment où il entrait dans une vallée étroite, rude et difficile pour une grande armée, il donna sur lui si brusquement, que Tigrane prit la fuite, abandonnant tous ses bagages. Il périt dans cette affaire un grand nombre d’Arméniens ; et un plus grand nombre encore furent faits prisonniers.

Lucullus, encouragé par ses succès, lève son camp, marche sur Tigranocertes, et assiège la ville. Il y avait dans Tigranocertes une foule de Grecs que Tigrane avait transportés de la Cilicie, ainsi qu’une quantité de Barbares qui avaient éprouvé le même sort : Adiabéniens[2], Assyriens, Gordyéniens, Cappadociens, peuples dont Tigrane avait détruit les villes, et qu’il avait forcés de s’établir dans la sienne. D’ailleurs elle regorgeait de richesses et d’ornements de toute espèce ; tous les habitants, les simples particuliers comme les grands, s’étaient piqués à l’envi, pour faire leur cour au roi, de contri-

  1. C’était la nouvelle capitale de son royaume.
  2. L’Adiabène était à l’occident de la Mésopotamie.