Aller au contenu

Page:Poètes Moralistes de la Grèce - Garnier Frères éditeurs - Paris - 1892.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
237
NOTICE SUR SOLON

les autres l’attendaient de leur nombre et de la mesure des terres qui leur seraient distribuées. Les deux partis avant donc conçu les plus grandes espérances, leurs chefs sollicitaient Solon de se faire roi et de prendre le gouvernement d’une ville où il avait déjà tout le pouvoir. La plupart même de ceux qui tenaient le milieu entre les deux partis, n’espérant pas de la raison et des lois un changement favorable, n’étaient pas éloignés de remettre toute l’autorité entre les mains de l’homme le plus juste et le plus sage. On dit même qu’il reçut de Delphes l’oracle suivant :

À la poupe placé, le gouvernail en main,
De ce vaisseau flottant assure le destin :
Tous les Athéniens te seront favorables.

Ses amis surtout lui reprochaient de n’oser s’élever à la monarchie, parce qu’il en craignait le nom ; comme si la vertu de celui qui s’était emparé de la tyrannie n’en faisait pas une royauté légitime. « N’en a-t-on pas vu, lui disaient-ils, un exemple en Eubée, dans la personne de Tinnondas ? et ne le voyons-nous pas encore aujourd’hui à Mitylène, où l’on a investi Pittacus du pouvoir suprême ? » Mais Solon ne put être ébranlé par toutes ces raisons ; il répondit à ces amis que la tyrannie était un beau pays, mais qu’il n’avait point d’issue. Dans ses poésies, il dit sur ce sujet à Phocus :

« Si j’ai épargné ma patrie, si je n’ai pas voulu, dans la crainte de flétrir ma gloire, avoir recours à la tyrannie et à la violence, je ne le