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Page:Poètes Moralistes de la Grèce - Garnier Frères éditeurs - Paris - 1892.djvu/49

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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

sement général. Il s’agit de savoir qui l’emportera d’un mouvement sans règle et sans frein, qui prolonge la création et jamais ne l’achève, du temps sans mesure et sans loi, qui dévore ses enfants à peine mis au jour ; ou de ce principe supérieur, échappé à ses atteintes, qui doit régler son cours, assujettir à des lois constantes la marche du monde et le conduire enfin à sa maturité. Il s’agit de savoir si ce monde tombé par Cronos de l’espace dans le temps, s’ordonnera par Jupiter dans les limites de l’année ; s’il passera définitivement du règne de l’infini, temps ou espace, qui menaçait de le replonger dans le chaos primitif, au règne du fini, qui l’organise dans l’étendue et dans la durée à la fois.

Tel est le dernier acte et le dénouement de la Théogonie, de ce drame sublime du monde, dont Eschyle comprit la mystérieuse grandeur, et dont il donna, dans son Prométhée enchaîné, le plus beau commentaire. Jupiter, après sa victoire sur les Titans, est proclamé par les dieux eux-mêmes roi de l’Olympe ; il leur dispense honneurs et fonctions. Principe à la fois intellectuel, moral et physique de l’Univers, sa première épouse est Métis, la sagesse ; il l’avale pour se l’assimiler, pour qu’elle lui découvre le bien et le mal, pour que nul autre, plus sage que lui, ne puisse lui disputer l’empire, pour que de lui seul naisse Athéné, la Vierge immortelle, cette même sagesse révélée au monde, dont elle devient le type, comme avant elle l’avait été de la beauté Aphrodite. Puis il s’unit a Thémis, la loi éternelle de proportion, de justice et de paix,