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Page:Poe - Contes inédits traduction William L. Hughes, Hetzel.djvu/195

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désolant et en me convainquant. Elle alla jusqu’à m’accuser en riant d’agir avec beaucoup d’imprudence, avec étourderie. Elle me conseilla de me rappeler que je ne savais vraiment pas qui elle était, que j’ignorais sa fortune, sa parenté, sa position dans le monde. Elle me pria, avec un gros soupir, de réfléchir à la proposition que je venais de lui faire, et qualifia mon amour d’infatuation, de fantaisie passagère, sans fondement solide, fille de l’imagination plutôt que du cœur. Elle murmura cette fin de non-recevoir, tandis que les ombres du doux crépuscule s’épaississaient autour de nous, — puis, par une légère pression de sa main mignonne, elle renversa en un instant l’édifice d’arguments qu’elle venait d’élever.

Je répondis de mon mieux, — comme un amoureux peut seul répondre. Je parlai avec chaleur, longuement et avec persistance, de mon dévouement, de ma passion, de sa beauté suprême, de mon admiration sans bornes. Pour conclure, j’appuyai, avec une énergie persuasive, sur les dangers qui menacent de troubler le cours de l’amour, — « le cours des amours véritables qui n’a jamais coulé sans obstacle[1], » et je conclus qu’il y aurait

  1. Phrase shakspearienne devenue proverbiale. — (Note du traducteur.)