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Page:Poe - Contes inédits traduction William L. Hughes, Hetzel.djvu/94

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flambait joyeusement dans l’âtre. Une jeune et belle personne, assise devant le piano où elle chantait une ariette de Bellini, s’interrompit à mon approche pour me recevoir avec une gracieuse courtoisie. Le ton de sa voix était peu élevé, et tout en elle respirait un certain air de résignation. Je crus aussi reconnaître les traces d’une profonde douleur sur sa physionomie, dont la pâleur excessive n’avait rien qui me déplût. Elle était en grand deuil et m’inspirait un sentiment de respect mêlé d’admiration et d’intérêt.

J’avais ouï dire à Paris que la maison où je me trouvais était gouvernée d’après la méthode connue sous le nom de « système de la douceur ; » — qu’on n’y infligeait aucune punition ; — qu’on y avait rarement recours à la réclusion solitaire ; — que les malades, surveillés en secret, y jouissaient en apparence d’une liberté assez complète, et que la plupart d’entre eux pouvaient se promener à leur guise dans les bâtiments ou dans le parc, vêtus comme les gens du dehors.

Me rappelant ces détails, j’eus soin d’user de discrétion en présence de la jeune dame ; car je n’étais pas certain qu’elle eût sa raison. Je remarquai d’ailleurs dans son regard un éclat inquiet qui ne me rassurait qu’à moitié. Aussi, je me bornai à causer de choses banales, qui ne me sem-