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Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 4, 1927.djvu/100

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fois à l’Élysée. Contrairement aux affirmations des frères de M. Gaston Calmette et à mon propre sentiment, il paraît toujours croire que le directeur du Figaro avait l’intention de publier de nouvelles lettres privées. Il résiste, d’ailleurs, crânement aux assauts du destin. Alors qu’aux heures où lui sourit la fortune, il se prend volontiers pour le nombril du monde, il semble avoir acquis, dans l’épreuve, un sens plus juste des réalités. Il me parle avec un remarquable sang-froid. Il paraît maîtriser sans effort un tempérament qu’exaspèrent parfois les froissements les plus légers. Il me remercie d’avoir dit à M. Doumergue que je consentirais volontiers à être entendu comme témoin dans l’instruction et à rapporter l’entretien que j’avais eu avec lui, M. Caillaux, le matin du jour où Calmette a été tué. Je lui indique le sens général de mes souvenirs, qui concordent avec les siens. Quelques jours après, M. Forichon, premier président de la Cour d’appel, se présente à mon cabinet pour recueillir ma déposition dans les formes légales.

Ces pénibles incidents absorbent une partie de mes journées. Cérémonies, banquets, discours, remplissent presque tout le reste de ma vie officielle : orphelinat de l’enseignement primaire, orphelinat des chemins de fer français, presse judiciaire, que sais-je encore ? Je tiens cependant à me renseigner régulièrement sur les affaires extérieures et sur les questions militaires. MM. Doumergue et Noulens ne négligent rien pour que je sois informé. Je regrette que les crédits demandés en 1913 pour le matériel d’artillerie ne soient pas encore votés et que l’admission des emprunts étrangers sur le marché de Paris ait devancé l’emprunt français