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Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 4, 1927.djvu/29

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fait part de son sentiment à M. Doumergue, avec lequel il m’avait, d’ailleurs, manifesté l’intention de s’entretenir lui-même.

La Russie, qui demandait, de son côté, à augmenter la première tranche des emprunts qu’elle désirait placer en France, était peu favorable à l’admission des titres turcs sur notre marché et M. Delcassé en avertissait, le 23 janvier, M. Gaston Doumergue11 : « Le chargé d’affaires de Russie à Constantinople, disait-il, télégraphie que le gouvernement allemand, escomptant une prochaine réalisation de l’emprunt turc sur le marché de Paris, offre à la Porte de lui vendre les cuirassés de bataille Moltke et Gœben. Ces deux bateaux, lancés en 1910 et 1911, sont des dreadnoughts par leur déplacement, qui est de 23 000 tonnes. Mais les canons de 280 millimètres, qui forment leur grosse artillerie et la faible épaisseur de leur cuirasse ne leur permettraient pas de soutenir la lutte contre des bateaux contemporains de même déplacement qui ont tous une artillerie plus puissante et une meilleure protection… Avec le produit de leur vente, l’Allemagne enrichirait sa flotte de deux unités capables de se mesurer avec les unités les plus redoutables des flottes étrangères. J’ai eu l’occasion de vous signaler l’attention inquiète avec laquelle le gouvernement impérial suit les tentatives de la Turquie pour se procurer immédiatement des bâtiments de guerre. On connaît les intentions belliqueuses de la Porte à l’égard de la Grèce. D’autre part, les ambassades de France et de Russie à Constantinople s’accordent à dénoncer entre les gouvernements bulgare et turc des tractations