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Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 4, 1927.djvu/32

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figure de Napoléon, qui signe sa seconde abdication, cadavre du duc de Berry, prince Président entouré de Persigny, de Morny et de Saint-Arnaud et préparant avec eux son Deux-Décembre, puis rapide défilé des magistrats républicains, Grévy démissionnaire, Carnot assassiné, Casimir-Perier démissionnaire, Félix Faure expirant, MM. Loubet et Fallières arrivant sans trop d’encombre au terme normal de leur présidence et visiblement heureux d’en être déchargés.

Mes entretiens avec M. Doumergue et avec quelques-uns des ministres, d’assez rares visites d’hommes politiques, les séances des conseils, la lecture des comptes rendus parlementaires, voilà tout ce qui me rattachait à la vie publique. Je n’avais, d’ailleurs, nullement à me plaindre du cabinet radical. Il me témoignait une déférente confiance. Il gouvernait ; je présidais ; il ne doutait pas de ma loyauté. Dans les conseils qui se tenaient à l’Élysée, je disais librement mon opinion sur toutes choses, mais je n’avais pas la vaine prétention de l’imposer aux ministres responsables. Avec un jugement très sûr et très fin, M. Doumergue s’expliquait sur les affaires extérieures. M. Bienvenu-Martin, garde des Sceaux, présentait des observations discrètes, mais sages et pertinentes. M. René Renoult, ministre de l’Intérieur, qui avait été, en janvier 1913, un de mes adversaires les plus passionnés, mais qui avait toujours eu avec moi, au barreau, d’excellentes relations confraternelles, me témoignait des égards irréprochables, tout en me laissant par principe dans l’ignorance de son action administrative. M. Caillaux gérait les finances avec une compétence exceptionnelle et avec un très élégant savoir-faire.