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Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 6, 1930.djvu/53

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ouvert par les soins de la colonie italienne. Je suis reçu par M. Tittoni, toujours énigmatique et souriant, et je trouve, parmi les blessés, un assez grand nombre de garibaldiens en chemises rouges, joyeux et pittoresques.

Millerand a revu Joffre et lui a fait connaître la décision du Conseil au sujet d’une expédition en Serbie. Le commandant en chef s’est enfin laissé convaincre.

Je reçois, le lundi 8 février, le général Ricciotti Garibaldi qui s’introduit péniblement dans mon cabinet à l’aide de deux béquilles et qui m’inonde immédiatement sous les flots de sa barbe grise et de ses paroles dorées. Il me déclare tout net que, si l’Italie ne marche pas avec nous, il y provoquera une révolution. Mais il est sûr qu’elle finira par marcher. Individuellement, tous les membres du gouvernement sont disposés à l’action : collectivement, ils hésitent. « Mon ami Salandra, mon ami Sonnino… » Après avoir fait étalage de toutes ses amitiés, le général m’exprime longuement trois vœux : premièrement, que nous aidions pécuniairement l’Italie, qui est incapable de soutenir seule l’effort financier d’une guerre ; deuxièmement, que notre flotte se montre plus active dans l’Adriatique ; troisièmement, que nous le laissions lever lui-même un corps de trente mille garibaldiens parmi les Italiens qui résident en France. Il voudrait que ce corps fût envoyé dans les Balkans. Il prétend que la Serbie n’en prendra pas ombrage. Il lui a, dit-il, donné l’assurance que l’Italie ne convoitait pas la Dalmatie. Tout au plus, demanderait-elle un régime spécial pour Zara et Spalato. Rien pour Raguse. Rien pour Cattaro. Mais au nom de qui parle-t-il ?

Je reçois également le docteur Costinesco, fils