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Page:Poincaré - Comment fut déclarée la guerre de 1914, Flammarion, 1939.djvu/124

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RAYMOND POINCARÉ

ambassadeurs à Berlin et à Paris pour les prier de demander aux gouvernements près desquels ils sont accrédités des assurances à ce sujet. Paul Cambon.

Tandis que l’Angleterre, que des hommes politiques et des écrivains allemands, voire américains ou français, ont si passionnément accusée d’avoir voulu la guerre, tardait ainsi à prendre un parti définitif, tandis que M. Asquith et sir Ed. Grey s’épuisaient en efforts de conciliation et se refusaient à désespérer de la paix, la vague germanique déferlait déjà sur nos frontières dégarnies.

Bâle, 31 juillet 1914. Consul général à Affaires étrangères. Depuis hier soir, la frontière alsacienne et badoise est barrée. Les tramways de Bâle ne dépassent pas la douane suisse. Huningue est occupée par des forces qu’on évalue à trois compagnies d’infanterie et la gare de Saint-Louis est gardée militairement, ainsi que les lignes alsaciennes qui y aboutissent.

Luxembourg, 31 juillet 1914. Renseignements de source sûre. Toutes les routes gardées militairement côté lorrain. À Reutgen poste 133e Thionville. Entre Reutgen et Preisch (mots passés) factionnaires sur la grande route. Même chose à Uling, etc. Route barrée gros fils de fer d’un arbre à l’autre. Les factionnaires route Preisch ont dit à nos observateurs avoir consigne ne pas laisser passer automobiles ni voitures sans visite, craignant dynamitage des ponts. Chaque factionnaire 75 cartouches. 135e infanterie Thionville occupe frontière Luxembourg, etc. Signé : Mollard.

État-major de l’armée, 2e bureau, 31 juillet. Dans la région de Metz, la couverture entre la frontière de Luxembourg et la Seille, vers Cheminot, semble actuellement assurée par la 33e division et la brigade bavaroise, la 34e division restant disponible. L’armement de Metz et de Thionville continue… La tête de pont d’Huningue est occupée. Mouvements de troupes signalés à Sarrebruck. Le dispositif de couverture semble se compléter dans les Vosges. Le 30 juillet, des troupes de Colmar ont été dirigées dans la soirée sur Munster. La vallée de la Bruch est occupée. On signale de gros mouvements de troupes partant de Strasbourg par voie ferrée. Depuis 15 h. 30, on signale la rupture des relations téléphoniques internationales.

Dans l’après-midi, nous apprenons par des télégrammes de Berlin, puis par une démarche de M. de Schœn auprès de M. Viviani que la Russie aurait, de son côté, décrété la mobilisation générale. Nous n’avons, à ce sujet, aucune nouvelle directe de Saint-Pétersbourg. Dans les informations données hier, soit par M. Paléologue, soit par M. Isvolsky, il n’était question que de mesures préparatoires, nullement d’une décision définitive et officielle. Rien de nouveau ne nous est venu depuis lors, ni de notre ambassade de Russie, ni de l’ambassade russe à Paris, et par un hasard extraordinaire, ce ne sera qu’à 20 h. 30 du soir qu’arrivera à Paris le télégramme laconique de M. Paléologue : Pétersbourg,