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PRÉFACE


Le problème de l’origine du Monde a de tout temps préoccupé tous les hommes qui réfléchissent ; il est impossible de contempler le spectacle de l’Univers étoilé sans se demander comment il s’est formé ; nous devrions peut-être attendre pour chercher une solution que nous en ayons patiemment rassemblé les éléments, et que nous ayons acquis par là quelque espoir sérieux de la trouver ; mais si nous étions si raisonnables, si nous étions curieux sans impatience, il est probable que nous n’aurions jamais créé la Science et que nous nous serions toujours contentés de vivre notre petite vie. Notre esprit a donc réclamé impérieusement cette solution, bien avant qu’elle fût mûre, et alors qu’il ne possédait que de vagues lueurs, lui permettant de la deviner plutôt que de l’atteindre. Et c’est pour cela que les hypothèses cosmogoniques sont si nombreuses, si variées, qu’il en naît chaque jour de nouvelles, tout aussi incertaines, mais tout aussi plausibles que les théories plus anciennes, au milieu desquelles elles viennent prendre place sans parvenir à les faire oublier.

On pourrait penser que l’Univers a toujours été ce qu’il est aujourd’hui, que les êtres minuscules qui rampent à la surface des astres sont périssables, mais que les astres eux-mêmes ne changent pas, et qu’ils poursuivent glorieusement leur vie éternelle, sans se soucier de leurs misérables et éphémères parasites. Mais il y a deux raisons de rejeter cette manière de voir.

Le système solaire nous présente le spectacle d’une parfaite harmonie ; les orbites des planètes sont toutes presque circulaires, toutes à peu près dans un même plan, toutes parcourues dans le