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Page:Poirier de Narçay - La Bossue.djvu/169

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aussi hauts que moi. Les baliveaux ont été broutés tant de fois qu’ils ressemblent, le diable m’emporte, aux colonnes de mon buffet de salle à manger. Allez donc vendre des bois troussés, truissés plutôt comme ça.

Examinez les ventes situées au-dessous de Grosley, celles avoisinant le val Saint-Martin, c’est comme si le feu y avait passé. Et il y en a bien d’autres semblables.

Pourtant M. le marquis veut que je lui trouve de l’argent là-dedans chaque année. C’est à en donner sa langue aux chats.

Ah ! mon pauvre Loriot, tout n’est pas rose dans l’existence d’un régisseur. Laissez vos braconniers descendre la bicherie.

— C’est ce que je fais.

— Très bien. Et Billoin comment va-t-il ?

— Toujours de mal en pis. Depuis la Saint-Hubert, il nous semblait tout chose.

— Ah ! oui, l’histoire du cerf de chasse tué sous le nez du marquis. Je me souviens parfaitement. Il me semble même que M. de Curvilliers lui gardait rancune depuis ce jour, bien à tort suivant moi.

— Que voulez-vous les maîtres sont souvent injustes.

— À qui le dites-vous ? Enfin faites pour le mieux, n’est-ce pas. À propos je vous enverrai demain un marchand de bois de Bernay qui désire acheter le taillis et les chênes du secteur de la Soudière. Montrez-lui tout cela en évitant de le conduire dans la partie sud qui a été ravagée, dès la première année, par les animaux.

— C’est entendu.

— Bon, adieu Loriot.

Alors le brigadier se retirait et s’acheminait lentement vers la forêt, trop lentement même, car il s’arrêtait pour parler à l’un et à l’autre, buvant du cidre ici, de l’eau-de-vie là, si bien qu’en regagnant son poste le digne homme voyait les arbres doubles.

Son amabilité en ces circonstances qu’on pourrait appeler alcoolique, était au-dessus de tout éloge.

Il avait ce qu’on appelle : l’ivresse bonne. Une pointe