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Page:Poisson - Recherches sur la probabilité des jugements en matière criminelle et en matière civile, 1837.djvu/183

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aucun doute de la reproduction de ce phénomène, lorsque sa cause aura lieu de nouveau. Or, cette assurance suppose que notre esprit attribue à la cause une puissance quelconque de produire son effet, et qu’il admet une liaison nécessaire entre ces deux choses, indépendamment du nombre, plus ou moins grand, de leurs concours observés.

Ainsi, lorsque M. Œrsted découvrit qu’en faisant communiquer les deux pôles d’une pile de Volta, au moyen d’un fil métallique, il arrivait qu’une aiguille aimantée, suspendue librement dans le voisinage de ce circuit voltaïque, déviait de sa direction naturelle ; l’illustre physicien fut sans doute convaincu, après avoir répété un petit nombre de fois cette expérience capitale, que le phénomène ne manquerait pas de se reproduire constamment par la suite. Cependant, si notre raison de croire à cette reproduction était uniquement fondée sur le concours du circuit voltaïque et de la déviation de l’aiguille aimantée, observé une dixaine de fois, par exemple, la probabilité que le phénomène arriverait encore dans une nouvelle épreuve, ne serait que 11/12 (no 46) : dans une nouvelle série de 10 épreuves, il y aurait à parier 11 contre 10, ou à peu près un contre un, que l’événement aurait encore lieu sans interruption ; et dans une plus longue série d’expériences futures, il deviendrait raisonnable de penser que le phénomène ne se reproduirait pas à toutes les épreuves.

Je citerai encore pour exemple l’heureuse application à la composition chimique des corps, que M. Biot a faite récemment de la polarisation progressive de la lumière dans un sens déterminé, dont il avait depuis long-temps constaté l’existence dans des milieux homogènes et non cristallisés[1]. Lorsque dans un nom-

  1. Le principe de cette application est exposé clairement et en peu de mots dans la note suivante que M. Biot a bien voulu me communiquer :

    « Un rayon lumineux de réfrangibilité fixe a été polarisé par réflexion dans un certain plan. On l’analyse après sa réflexion, en lui laissant traverser un rhomboïde de chaux carbonatée rendu légèrement prismatique par sa face postérieure ; et l’on s’assure qu’il possède tous les caractères de la polarisation relativement au plan dont il s’agit. Ainsi, lorsque la section principale du prisme rhomboïdal est parallèle au plan de réflexion, le rayon passe simple subit tout entier la réfraction ordinaire. Mais, si l’on tourne cette section, soit à