XII
À quoi tient la force pathétique de la fleur des champs ? À ce que la fleur est si répandue. Une fleur de laquelle on pourrait dire simplement qu’elle n’est pas très rare ne nous toucherait peut-être point. Mais celle dont nous savons que la Nature, chaque printemps, reproduit l’image à profusion, celle-là ne peut cesser de nous émouvoir et de nous étonner. Elle est le nombre, la multitude. Moins une fleur des prés que la prairie en fleurs.
Au trèfle d’Amérique sur lequel a soufflé la brise des grandes plaines, au pissenlit qui, même en bouquet, semble toujours sur son calice frêle supporter la voûte des cieux, comparez l’œillet vert qui s’étale à la boutonnière d’Oscar Wilde.
Deux poésies, deux esthétiques, mais aussi deux âmes, deux mondes de passions différents.