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Page:Porché - L’Amour qui n’ose pas dire son nom, 1927.djvu/50

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LA TRADITION D’ANATHÈME

un Henri III et sa Cour, dans lequel il n’est pas fait la moindre allusion aux mignons et à leur emploi. Mais en Russie, il n’y a pas encore bien longtemps, le moujik appelait « jeux de nobles » les privautés de ce genre. De même, en France, autrefois, elles n’étaient tolérées que chez les grands seigneurs[1].

Étonnez-vous ensuite de la réserve que les écrivains, en ce temps-là, montraient sur la question ! Outre qu’ils partageaient presque tous, probablement, l’opinion commune, est-il juste d’appeler timidité une abstention faute de laquelle on courait le risque de devenir soi-

  1. Au xvie siècle, Muret est bien téméraire lorsqu’il célèbre les charmes de son petit ami. Quoiqu’il écrive en latin, et dans le meilleur style, il sent le fagot, il doit fuir. Quelque trente ans plus tard, un soupçon plane sur Théophile, et comme le poète, en outre, a contre lui qu’il est huguenot de naissance, bien lui en prend de chercher protection auprès du duc de Montmorency, à Chantilly. Sous Louis XV, deux pédérastes furent brûlés en Grève. Sous Louis XVI encore, peu avant 1789, un capucin convaincu du même vice subit le même châtiment. Hors de France, la barbarie est pareille dans tout l’occident.

    Aujourd’hui même, on retrouve dans le code pénal de différents pays d’Europe (Allemagne, Autriche, Angleterre) comme un reflet de ces bûchers ; ce sont des articles édictant des peines de prison, voire de travaux forcés contre la sodomie. Wilde, il y a trente-deux ans, fut victime de cette tradition flamboyante. Le nouveau Code pénal italien, promulgué tout récemment, marque, sur ce chapitre, un retour aux anciennes sévérités.