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Page:Potvin - Peter McLeod, 1937.djvu/143

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Peter McLeod

glaces comme pour l’éternité. Ce paysage entier déroule une symphonie blanche où, par endroits, au bord de la grande nappe, des boqueteaux de sapins et d’épinettes mettent des taches vert sombre. À l’ouest, des montagnes se dressent barbouillées d’ocre et plaquées, ça et là, de blanc légèrement bleuté. Dans le ciel clair, au-dessus de tout cela, il y a l’errance des étoiles qui parcourent leur cycle immuable. L’ombre de la forêt s’étend, oblique, sur le lac. Il fait froid dans ce calme. L’air gelé est résistant, presque palpable. Aucun souffle ne l’agite. La lune est comme toute penchée d’un côté, au dessus des montagnes, pâle au milieu de l’espace. Elle arrondit sa gueule débonnaire, et une joue se creuse dépassant le souffle du dernier quartier. Elle répand sur tout ce paysage polaire une lumière presque blafarde, celle qu’elle nous jette chaque mois à la fin de sa résurrection. C’est la nuit, la grande nuit froide et bleue.

Ploc, ploc, ploc !… la neige gémit sous les raquettes qui la martèlent. Encore plus pour se réchauffer que pour ne pas arriver trop tard à la maison de Tommy Smith, Peter McLeod et son compagnon marchent de toute la vitesse de leurs jarrets qui avaient pourtant déjà, pour cette journée, sept lieues de course. Le “trail” était facile, il suivait les méandres de la grève. Aussi, avaient-ils à peine marché une demi-heure qu’ils entendirent, au pied d’un gros cran qui paraissait tout noir dans la blancheur ambiante, des aboiements furieux. Pit Tremblay crut entendre parmi ces cris la voix de ses « huskies » et allongea ses foulées… En une minute, on fut à l’en-