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Page:Potvin - Peter McLeod, 1937.djvu/170

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Peter McLeod

alors que de nombreuses équipes d’hommes étaient occupées à charger les navires et à construire les cages !…

C’était alors tout un art, toute une industrie que de construire une bonne cage de bois carré qu’il fallait descendre par le Saguenay et le Saint-Laurent, jusqu’à Québec ou à Montréal, et parfois remorquer jusqu’en Angleterre ! Certaines de ces cages, en effet, étaient construites assez solidement pour affronter la traversée de l’océan et n’être démolie que dans un port anglais. On évitait ainsi les frais multiples qu’entraînait l’arrimage d’un navire.

Les anciens “lumberjacks” du Saguenay étaient passés maître dans l’art de construire ces cages de bois qui firent l’admiration des anciens quand ils les voyaient descendre à la queue-leu-leu les fleuves et les rivières sous les souffles laurentiens. La descente de ces étranges caravanes au courant de nos rivières avec leurs mâts de sapin surmontés de gigantesques bouquets de feuillage, avec leurs banderoles aux couleurs que variait la fantaisie des joyeux lurons qui les montaient, leurs immense voiles et les cabanes de planches reliées par des « cordées » de linges multicolores, avait quelque chose de fantastique, d’irréel que l’imagination la plus vagabonde pouvait à peine concevoir… surtout quand la nuit s’étendait toute nue sur la rivière, quand il coulait le long des rives des torrents de silence qui noyaient tout… Des lumières piquaient de points de feu ces petits villages qui marchaient lentement sur l’onde. Les braises de leurs cambuses teintaient l’eau de lueurs étranges et parfois des ombres dures traversaient leur clarté ; des gesticulations d’hommes