Aller au contenu

Page:Pour lire en traîneau - nouvelles entraînantes.pdf/60

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 30 —

nesse que je revoyais défiler sous mes yeux dans une subite et suprême évocation !

Oui, nous autres, vieux Parisiens, qui avons le malheur involontaire de vieillir, nous aimons tant notre ville, que nous conservons surtout pieusement au fond de notre cœur, tous ses enfants disparus !

Est-ce du fétichisme puéril ou du ramollissement ? Ni l’un ni l’autre. C’est simplement l’idée instinctive du noyé qui se raccroche à toutes les branches de la rive !

Or, la vie, c’est le fleuve qui nous emporte tous vite, et nos souvenirs sont comme les branches auxquelles nous voulons nous raccrocher désespérément.

— Diable, allez-vous dire, c’est très mélancolique, ce que vous dites-là.

— Pas du tout, c’est la constatation même de la vie et c’est même ce qui la distingue de la Compagnie de l’Ouest.

— Comment cela ?

— Dame ! en venant au monde, on ne trouve pas dans son berceau, que je sache, un billet d’aller et retour… comme à la gare Saint-Lazare !

— C’est pourquoi vous l’aimiez tant ?

— Vous l’avez dit.