Aller au contenu

Page:Pour lire en traîneau - nouvelles entraînantes.pdf/63

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 33 —

née et résolue aux pires extrémités, dans la salle des Pas-Perdus de la gare Saint-Lazare.

Le mot était : « Suivant les circonstances, assommez le président Loubet si faire se peut ; en tout cas, si la police vous empêche de l’atteindre, conspuez-le fortement. » J’étais là, avec mon coupe-file à la main, mais n’ayant pas voulu me mêler à cette tourbe calme en apparence, froide et sinistre, lorsqu’un de mes amis, un vieux socialiste de Seine-et-Oise, tenant un des grands cafés de Saint-Cloud, en face le Cadran-Bleu, — je précise, — et mort depuis, vint à passer.

— Eh bien ?

— Ça sent mauvais.

— Je suis au milieu de cette foule pour voir.

— Prenez garde d’être reconnu ; c’est dangereux.

— Bast.

— Venez me retrouver chez Mollard quand le président sera rentré.

— Entendu.

Et une heure plus tard, en prenant un bock, voilà ce que me racontait mon ami :

— Petit à petit, je me suis insinué dans cette foule compacte, et des messieurs très chics se mirent à circuler dans les groupes en nous disant :

— Vous connaissez le mot d’ordre du patron : « Tapez, et s’il n’y a pas moyen, gueulez ferme, au moins, au passage de Loubet, » et en même temps ils nous remettaient à tous un paquet de tabac de cinquante centimes.