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Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/108

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Enfin le père arriva ; mais ce que je n’avais pas prévu, à peine eut-il appris que je l’attendais, et que j’étais accompagné d’une jeune fille, que, sortant avec autant de diligence que s’il eût été menacé de quelque péril, il me fit dire par le domestique qui m’avait reçu, qu’après l’explication qu’il avait eue avec moi, il s’étonnait que je prétendisse le forcer de recevoir une fille qu’il ne reconnaissait point. Choqué comme je le fus de cette grossièreté, je pris Théophé par la main, et je lui dis que sa naissance ne dépendant point du caprice de son père, il importait peu qu’elle fût reconnue de Condoidi, lorsqu’il paraissait manifestement qu’elle était sa fille.

« Le témoignage du cadi et le mien, ajoutai-je, auront autant de force que l’aveu de votre famille, et je ne vois rien d’ailleurs à regretter pour vous dans l’amitié qu’on vous refuse ici. »

Je sortis avec elle, sans qu’on me fît la moindre civilité pour me conduire à la porte. N’ayant rien à exiger de trois jeunes gens dont je n’étais pas connu, je leur pardonnai plus aisément leur impolitesse que la dureté avec laquelle ils avaient traité leur sœur.

Cette malheureuse fille paraissait plus affligée de cette disgrâce que je l’en eusse crue capable après la difficulté qu’elle avait marquée à me suivre. Je remettais à lui déclarer mes vues chez le maître de langues,