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Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/135

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feux de l’amour allumés dans ses yeux. Il devint un transport de fureur, en lui entendant ajouter qu’elle demandait vingt-quatre heures pour se déterminer. Elle finit cette scène par des instances qu’elle n’adressa qu’à lui, pour obtenir qu’il se retirât ; et, faisant ensuite réflexion qu’il pouvait trouver choquant qu’elle m’exceptât de cette prière, ou qu’elle fît difficulté de le souffrir longtemps dans un lieu où il m’avait trouvé, elle ajouta fort adroitement qu’avec un bienfaiteur à qui elle devait la liberté, elle s’observait moins qu’avec un étranger qu’elle avait à peine vu trois fois.

J’aurais peut-être trouvé dans la fin de ce discours de quoi diminuer ou suspendre le chagrin qui me dévorait, si mes prétentions m’eussent laissé l’esprit assez libre pour y découvrir ce qu’il y avait de flatteur et de consolant pour moi. Mais, frappé du terme qu’elle avait demandé pour sa réponse, désespéré de la joie du Sélictar, et presque étouffé par la violence que je me faisais pour cacher mon agitation, je ne pensai qu’à gagner la rue, dans l’espérance de me soulager du moins par quelques soupirs. Cependant n’ayant pas eu la force de sortir sans le Sélictar, ce fut un autre tourment pour moi de me voir obligé, en sortant avec lui, de soutenir son entretien pendant plus d’une heure, et d’entendre avec quelle satisfaction il se louait déjà de sa fortune. Je ne pus me persuader que la facilité avec la-