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Page:Prévost - Histoire d’une Grecque moderne (Flammarion, 1899), tome I.djvu/194

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Sélictar, et, lui ayant offert ses services auprès de Théophé, elle ne pouvait penser qu’il lui fût aisé d’en obtenir pour le Sélictar ce qu’elle savait qu’on ne m’avait point accordé. Mais c’était sur cette connaissance même qu’elle se fondait pour nourrir la faiblesse d’un amant. Après l’avoir confirmé dans l’opinion où il avait toujours été que je n’avais aucune liaison de galanterie avec mon élève, elle s’était flattée de connaître assez les inclinations et le tempérament d’une fille de cet âge pour répondre qu’elle ne résisterait pas éternellement au goût du plaisir, et la première promesse qu’elle avait faite était fondée sur l’espoir de ne pas trouver de résistance.

Il est vrai qu’attachée sans cesse autour de Théophé, et si habile d’ailleurs à gouverner son sexe, elle était plus redoutable dans cette entreprise que la chaleur même du tempérament sur laquelle toutes les espérances du Sélictar étaient fondées. Cependant quelque adresse qu’elle y eût employée, son projet devait être peu avancé lorsque la disgrâce de l’Aga des Janissaires avait jeté la consternation dans l’esprit du Sélictar. Toutes ses craintes n’ayant pu diminuer sa passion, il avait pressé d’autant plus Bema, que dans les incertitudes auxquelles il s’était d’abord livré, il avait mis en délibération s’il ne devait pas se sauver chez les Chrétiens avec tout ce qu’il pourrait recueillir de sa fortune, et qu’il l’aurait sacrifiée volon-