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Page:Praviel - Le Roman conjugal de M. Valmore, 1937.pdf/63

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CONTINUATION DES MALHEURS

tait sourdre et bruire dans son cœur la poésie éternelle. C’est justement parce qu’elle fut accablée sous tant de mauvais rôles qu’elle échappa à la contagion littéraire qui la guettait, qu’elle se garda étrangère à toutes les modes, qu’elle fut capable d’écrire en dehors du temps.

Contrairement à tant d’autres actrices, elle n’existait réellement qu’en dehors du théâtre, quand elle avait effacé le rouge et le blanc gras, dépouillé ses oripeaux de forte ingénuité, pour ne plus penser qu’à son enfant en nourrice, ou à son amant enfui. Là, seulement était sa vie, mélancolique, résignée, déchirée certes, mais malgré tout, sa vie dans la palpitation irrésistible de l’espoir et du regret.

Il suffirait d’un incident pour raviver tant de souffrance et de flamme ; Délie s’en aperçut vite, lorsque Hyacinthe de Latouche fut brutalement et définitivement ramené d’Italie par l’écroulement du monstrueux empire artificiel mis debout par Napoléon. Au printemps de 1814, les fonctionnaires français répandus en Europe ne tarderaient pas à se réfugier dans nos frontières.

Le poète des Projets de Sagesse allait, encore une fois rejouer lui-même sa pièce au naturel.

D’abord il se garda de reparaître à l’Odéon ou aux alentours. Mais on savait qu’il avait regagné Paris. Que ferait Marceline ? Elle désirait follement et tout à la fois elle craignait