Aller au contenu

Page:Procès verbaux des séances de la Société littéraire et scientifique de Castres, Année 2, 1858.djvu/334

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 334 —

dans cette longue et consciencieuse étude, à l’intérêt qu’il jette au milieu de ces aperçus que nous sommes facilement disposés à trouver oiseux, on sent l’action de cette faculté riche et brillante qui éclaire et anime tout ce qu’elle touche. Il s’agit d’un bien petit théâtre, d’une modeste commune. Sa place dans l’histoire n’est pas grande. Elle est mêlée à peu d’événements importants ; et si elle subit le contre-coup des luttes terribles qui désolèrent plusieurs parties du midi de la France, elle n’y prend pas une part directe. Sans doute, elle a ses jours de triomphe et ses jours de défaite, elle suit la fortune des seigneurs dont elle dépend ; mais elle n’a pas d’initiative, et ne passe guère par ces alternatives brusques de bonheur et de malheur qui font l’intérêt de l’histoire. Et cependant, cette petite commune se personnifie à nos yeux ; elle vit de sa vie propre ; elle a sa charte, ses habitudes, ses magistrats, ses institutions, ses charges, ses priviléges. Nous assistons à cette vie intime toujours intéressante à étudier, parce que c’est la vie réelle. Les actes publics d’un homme ne le révèlent pas toujours tout entier. Ils ne font voir, trop souvent, qu’une face de son existence, et ce n’est pas toujours la plus vraie. Pour avoir la pleine connaissance de lui-même, c’est dans son âme qu’il faudrait pénétrer, et puisque l’âme, lorsqu’elle ne se manifeste pas elle-même, est inaccessible à toute investigation, c’est dans les petites actions, dans la vie usuelle et cachée, dans ces mille petits secrets de la réalité, qu’il faut aller surprendre ce caractère, pour en connaître les grandeurs et les faiblesses, les vertus et les vices. Il en est ainsi des agglomérations d’hommes. En étudiant l’origine de Roujan, sa topographie, ses remparts, ses fossés, ses places, ses routes, ses limites ; en interrogeant ses mœurs, ses coutumes, son industrie, son administration civile et judiciaire ; en descendant dans tous ces petits détails qui sont des nécessités de la vie ; en cherchant ce qu’ont été ses édifices religieux et ses établissements charitables, sa population et les rapports qui l’unissaient, ne se sent-on pas