Page:Proudhon - De la Capacité politique des classes ouvrières.djvu/66

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n’atteignent pas. Ces différences d’intensité dans la conscience, l’idée et son application, constituent des degrés de capacité, elles ne créent pas la capacité même. Ainsi tout individu qui a la foi en Jésus-Christ, qui en affirme la doctrine par la profession de foi, et qui en pratique la religion, est chrétien, comme tel capable du salut éternel : ce qui n’empêche nullement que parmi les chrétiens il n’y ait des docteurs et des simples, des ascètes et des tièdes.

De même, être capable politiquement, ce n’est point être doué d’une aptitude particulière à traiter les affaires d’État, à exercer tel emploi public ; ce n’est pas témoigner d’un zèle plus ou moins brûlant pour la cité. Tout cela, je le répète, est affaire de talent et de spécialité : ce n’est pas ce qui fonde dans le citoyen, souvent silencieux, modéré, en dehors des emplois, ce que nous entendons ici par capacité politique. Posséder la capacité politique, c’est avoir la conscience de soi comme membre d’une collectivité, affirmer l’idée qui en résulte et en poursuivre la réalisation. Quiconque réunit ces trois conditions est capable. Ainsi nous nous sentons tous Français ; comme tel, nous croyons à une constitution, à une mission de notre Pays, en vue desquelles nous favorisons, de nos vœux et de nos suffrages, la politique qui nous paraît le mieux traduire notre sentiment et servir notre opinion. Le patriotisme peut être plus ou moins ardent en chacun de nous ; sa nature est la même, son absence une monstruosité. En trois mots, nous avons conscience, idée, et nous poursuivons une réalisation.

Le problème de la capacité politique dans la classe ouvrière, de même que dans la classe bourgeoise et autrefois dans la noblesse, revient donc à se demander : — a) si la