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La part revenant à la nature est payée au propriétaire foncier, qui est censé le créateur et l’ayant-droit du sol ;

La part revenant à la société lui arrive, partie par l’impôt, partie par la réduction du prix des choses, résultant de la facilité des relations et de la concurrence des producteurs.

Toute la question est donc de régulariser cette répartition, en faisant une balance exacte du doit et de l’avoir de chaque partie.

D’abord, il est un de ces comptes qui tend à disparaître : c’est le second, cette fiction légale par laquelle une part de la rente est assignée au sol, représenté par le tenancier ou propriétaire.

La propriété, avons-nous dit, est l’acte de préhension par lequel l’homme, antérieurement à toute justice, établit son domaine sur la nature, à peine d’être dominé par elle. Mais par cela même il implique contradiction que cet acte de préhension lui devienne un titre de redevance perpétuelle vis-à-vis du travailleur qu’il se substitue sur le sol, puisque ce serait lui attribuer vis-à-vis de celui-ci une action juridique en vertu d’un titre qui n’a rien de juridique, la préhension ; puisqu’en outre ce serait subordonner de fait le travailleur à la terre, tandis que le propriétaire qui renonce à l’exploiter obtiendrait sur elle un domaine métaphysique, ou, comme disent les légistes, éminent, qui primerait l’action effective du travailleur : ce qui répugne. La société autorise la préhension, dans certains cas elle l’encourage, la récompense même ; elle ne la pensionne pas.

Ajoutons qu’en suite de la balance qui a été faite entre le maître et le fermier, d’après les solutions précédentes, le propriétaire est devenu un producteur sui generis, dont les intérêts et les droits se confondent, vis-à-vis de la rente, avec ceux du fermier.