Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/356

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Ne saurait-on comprendre, d’abord, qu’entre le moyen mécanique préconisé par Malthus et par l’Académie des Sciences morales, et l’avortement, il n’y a pas, au point de vue de la morale, de différence essentielle ; que, si les époux ont des ménagements à garder, comme dit M. Dunoyer, envers le tiers non conçu, ils n’en ont pas de moindres envers ce même tiers après qu’il a été conçu ; que par conséquent le père, la mère, ou tous les deux, bientôt on dira l’État, étant juge du sort qui attend ce tiers infortuné, il n’y a pas plus de crime dans le ministère de la sage-femme qui détruit un fœtus de quarante jours ou de trois mois que dans l’acte du père qui supprime le germe, semen fundit in terram, avant la conception ? Et, ce pas franchi, la répression ne s’arrête plus : nous rétrogradons de terme en terme jusqu’au cannibalisme.

D’autre part, est-il si difficile de concevoir que, le restreint moral étant la condition désormais obligée des relations amoureuses, le mariage, considéré jusqu’ici comme une union sacramentelle, se résout en fornication simple ; qu’avec lui s’évanouit la famille ; de sorte que nous n’échappons à la sur-population que pour tomber dans la dépopulation ?

Pour moi, je le déclare au risque de me voir traiter une fois de plus de Cassandre, si les idées de Malthus

devaient un jour prévaloir, ce serait fait de l’humanité.

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Je dirai en peu de mots en quoi consiste la balance de la population, renvoyant pour le développement des principes sur lesquels repose toute cette théorie à d’autres études.

Le monde moral, comme le monde de la nature, existe par lui-même, assis sur des lois certaines, équilibré dans toutes ses parties.

De même que dans les transactions mercantiles et in-