Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/378

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se faire rois : ils eussent été sacriléges ; ils durent se contenter du titre d’empereurs.

Que peuvent les bénédictions du ciel même contre le vice intérieur qui tue les gouvernements ? Toutes les monarchies, aristocraties, démocraties de droit divin, sont tombées. On a accusé l’affaiblissement de la religion, la critique des légistes, le progrès de la philosophie, la désuétude, que sais-je ? On s’en est pris tantôt à l’imbécillité des princes, tantôt à l’effervescence populaire, tantôt au temps, qui use tout…. Vaines explications, contre lesquelles proteste le sentiment des peuples, dont le premier soin est de relever sans cesse le gouvernement abattu, et cela toujours aux mêmes conditions et sous les mêmes formules.

De nos jours, le droit divin paraît tombé en défaveur. Ce serait une grossière illusion de croire que parce qu’on a abrogé le mot, on a renoncé à la chose. Jamais, au contraire, on ne fut plus attentif, en reconstruisant le pouvoir, à invoquer l’intervention du ciel. Seulement, on s’est dit qu’en définitive, pour donner l’investiture au prince, pas n’était besoin d’une onction pontificale ; que l’esprit de Dieu était sur la place publique aussi bien que dans le chœur d’une église ; qu’il n’y avait qu’à rassembler les citoyens, et que, chacun déposant son suffrage en présence de l’Être suprême et après le sacrifice solennel, le souverain surgirait, comme par une évocation prophétique, de l’assemblée du peuple.

Ainsi le droit divin ne fit jamais défaut au pouvoir. En fait comme en droit, c’est toujours lui, lui seul, qui intronise le gouvernement. La démocratie du dix-neuvième siècle a crié plus haut que celle du moyen âge, Vox populi vox Dei, ce que M. Mazzini traduit par ces mots, Dio e popolo. Grâce à cette maxime. Napoléon Ier et Louis-Philippe, sortie de la dictature populaire, purent se