Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/91

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après sa chute ne serait pas sortie de la condition des bêtes, et que le premier fruit de la religion est cette raison philosophique elle-même, qui la méconnaît et l’outrage.

IX

À l’appui de ce résumé, je me bornerai à citer les passages suivants du Dictionnaire de Bergier, édition de 1843, revue, augmentée et annotée par messeigneurs Doney, évêque de Montauban, et Thomas Gousset, archevêque de Reims :

« Selon les théologiens, la Loi est la volonté de Dieu intimée aux créatures intelligentes, par laquelle il leur impose une obligation, c’est-à-dire les met dans la nécessité de faire ou d’éviter telle action, sinon d’être punies.

« Ainsi, selon cette définition, sans la notion d’un Dieu et d’une providence, il n’y a point de loi et d’obligation morale proprement dite.

« C’est par analogie que nous appelons lois les volontés des hommes qui ont l’autorité de nous récompenser et de nous punir ; mais si cette autorité ne venait pas de Dieu, elle serait nulle et illégitime. »

Jean-Jacques Rousseau, Kant, Spinoza lui-même, MM. Cousin, Jean Reynaud, Jules Simon, Pierre Leroux, tous les éclectiques, les spiritualistes, et jusqu’à M. Auguste Comte, qui en niant Dieu se raccroche au grand Être humanitaire, ne parlent pas autrement.

Bergier accorde bien que notre raison peut aller jusqu’à découvrir l’utilité de la loi, mais il nie qu’elle puisse nous en faire un devoir, en quoi il est suivi encore par la masse des philosophes :

« La raison ou la faculté de raisonner peut nous indiquer ce qu’il nous est avantagent de faire ou d’éviter, mais elle ne nous impose aucune nécessité de faire ce qu’elle nous dicte ; elle peut nous intimer la loi, mais elle n’a point par elle-même force de loi. Si Dieu ne nous avait point ordonné