Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 1.djvu/99

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et de la faire sienne : ce qui exclut radicalement et irrévocablement l’hypothèse transcendantale.

Il suit de là que la conscience, telle qu’elle est donnée par la nature, est complète et saine ; tout ce qui se passe en elle est d’elle ; elle se suffit à elle-même, elle n’a besoin ni de médecin ni de révélateur. Bien plus, cet auxiliaire céleste, sur lequel on veut qu’elle s’appuie, ne peut que faire obstacle à sa dignité et à sa justice, lui être une entrave et un achoppement.

Non-seulement donc la science de la Justice et des mœurs est possible, puisqu’elle repose, d’une part, sur une faculté spéciale de l’âme, ayant, comme l’entendement, ses notions fondamentales, ses formes innées, ses anticipations, ses préjugements ; de l’autre, sur l’expérience quotidienne, avec ses inductions et ses analogies, avec ses joies et ses douleurs. Il faut dire encore que cette science n’est possible qu’à la condition de se séparer entièrement de la Foi, qui loin de la servir la détruit.

Dans le système de la Révélation, la science de la Justice et des mœurs se fonde nécessairement, à priori, sur la parole de Dieu, expliquée et commentée par le sacerdoce. Elle n’attend rien de l’adhésion de la conscience, ni des confirmations de l’expérience. Ses formules, absolues, sont affranchies de toute considération purement humaine ; elles sont faites pour l’homme, non d’après l’homme, décrétées d’avance et à perpétuité. Il impliquerait qu’une doctrine sacrée reçût la moindre lumière des incidents de la vie sociale et de la variabilité de ses phénomènes, puisque ce serait soumettre l’ordre de Dieu à l’appréciation de l’homme, abjurer de fait la Révélation et reconnaître l’autonomie de la conscience, chose incompatible avec la Foi.

Tel est le Droit divin, ayant pour maxime l’Autorité : de là tout un système d’administration pour les États, de