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Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 2.djvu/477

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son entendement avant que la nature de cette idée ait été constituée telle par la détermination de sa volonté. Et je ne parle pas d’une simple priorité de temps, mais bien davantage :je dis qu’il a été impossible qu’une telle idée ait précédé la détermination de la volonté de Dieu par une priorité d’ordre ou de nature, ou de raison raisonnée, ainsi qu’on la nomme dans l’école, en sorte que cette idée du bien ait porté Dieu à élire l’un plutôt que l’autre. Par exemple, ce n’est pas pour avoir vu qu’il était meilleur que le monde fût créé dans le temps que dès l’éternité, qu’il a voulu le créer dans le temps ; et il n’a pas voulu que les trois angles d’un triangle fussent égaux à deux droits, parce qu’il a connu que cela ne se pouvait faire autrement, etc. Mais, au contraire, parce qu’il a voulu créer le monde dans le temps, pour cela il est ainsi meilleur que s’il eût été créé dès l’éternité ; et d’autant qu’il a voulu que les trois angles d’un tringle fussent nécessairement égaux à deux droits, pour cela cela est maintenant vrai. Et il ne peut pas être autrement, et ainsi de toutes les autres choses… Et ainsi une entière indifférence en Dieu est une preuve très-grande de sa toute-puissance. »


En deux mots, l’idée en Dieu vient à la suite du vouloir, non le vouloir à la suite de l’idée : sans quoi, observe Descartes, la liberté, qui en Dieu doit être infinie, serait nulle.

Ainsi, bien différent de Platon, qui fait les idées coéternelles à Dieu et y trouve le principe de toutes les déterminations divines, Descartes soutient que les idées elles-mêmes sont une création de l’arbitre divin, qui ne peut ni ne doit pouvoir être déterminé que par lui-même. S’il plaisait à Dieu que les trois angles d’un triangle cessassent d’être égaux à deux droits, cela serait ainsi, dit Descartes. En sorte que ce qui semble à nos intelligences bornées nécessaire d’une nécessité absolue n’est jamais, pour l’intelligence infinie, que d’une vérité relative. Et si l’on demandait à Descartes à quoi peut servir, dans le