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Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/244

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rance violée, par la fièvre de luxe et la recherche des voluptés ; la loi de justice, enfin, violée par l’acception des personnes, de laquelle naissent le parasitisme, l’inégalité d’instruction, le défaut d’équilibre dans les fonctions et la fausse répartition des produits.

Mais la nature, la raison et la justice ne se laissent pas impunément outrager. Elles trouvent leur sanction pénale dans le paupérisme, qui, se jetant sur la société, attaquant toutes les classes, creuse le déficit, engendre dans l’état la tyrannie, sème entre les nations la discorde, les pousse à la guerre, qu’il corrompt ensuite dans son essence et déprave.

Alors nous a été révélé le mystère d’iniquité. Nous avons compris comment la guerre, engendrée de famine, produit la rapine, et comment ce honteux réalisme est devenu l’idéal des héros. Nous avons vu la guerre, à l’origine des sociétés, confondant ses motifs politiques avec sa cause économique, s’identifier au brigandage ; toutes les épopées célébrer la gloire de ces illustres pirates, et la religion elle-même leur prodiguer ses bénédictions. Nous l’avons vue, cette guerre hypocrite, de libre et privée qu’elle était d’abord, se généraliser et devenir peu à peu une entreprise exclusivement publique, un privilége de l’État, mais en conservant toujours son caractère de piraterie. Nous avons assisté ensuite à la naissance de la conquête, par laquelle la guerre manifeste son caractère politique, révolutionnaire et providentiel, conformément au droit de la force ; et nous avons vu ces deux faits, pillage et conquête, le premier répondant au paupérisme qui cause la guerre, la seconde à la raison d’État qui la motive, se distinguer nettement l’un de l’autre dans la théorie, mais sans cesser de marcher de concert et de s’entre-servir dans l’action.

Enfin, la civilisation poursuivant, en dépit de la guerre et souvent même par la guerre, sa marche victorieuse,