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XVII.


1849. 29 JANVIER :


RÉACTION BARROT-FALLOUX ; DESTRUCTION DU GOUVERNEMENT.


Avec la présidence de Louis Bonaparte, commencent les funérailles du pouvoir. Cette transition suprême était indispensable pour préparer l’avènement de la République démocratique et sociale. La situation qui a précédé, les faits qui ont suivi le 10 décembre, et qui continuent de se dérouler avec une logique inexorable, vont nous le démontrer.

La France, en faisant la royauté de 1830, et fondant avec réflexion et liberté, après une lutte de quarante ans, le régime constitutionnel, le gouvernement des Thiers, des Guizot, des Talleyrand, avait posé le principe d’une révolution nouvelle. Comme le ver qui a l’instinct de sa prochaine métamorphose, elle avait filé son linceul. En se donnant, après une crise de neuf mois, un président, candidat de tous les partis et symbole de leur abdication, elle a dit son Consummatum est, et publié, avant de s’ensevelir, l’acte de ses dernières volontés.

La corruption du pouvoir avait été l’œuvre de la monarchie constitutionnelle : la mission de la présidence sera de mener le deuil du pouvoir. Louis Bonaparte, après sa défection à la cause révolutionnaire, n’est plus, comme eût été Cavaignac ou Ledru-Rollin, qu’un exécuteur testamentaire. Louis-Philippe a versé le poison à la vieille société : Louis Bonaparte la conduit au cimetière. Tout à l’heure je ferai passer devant vous cette procession lugubre.

La France, regardez-la de près, elle est épuisée, finie. La vie s’est retirée d’elle : à la place du cœur, c’est le froid métallique des intérêts ; au siége de la pensée, c’est un déchaînement d’opinions qui toutes se contredisent et se tien-