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Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/159

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solidité de son bonheur, — je veux dire que, ces soirs-là, il était assuré que jamais de sa vie, il ne pourrait être autre chose que soldat. C’est un état d’esprit assez particulier et qui n’est peut-être comparable qu’à la vocation des religieux. Pourtant, que cet état d’esprit fût celui de Maurice à certaines heures de sa vie, au milieu du courant qui l’emportait, c’est une chose digne de remarque, et assez étonnante.

Un jour, le peloton était allé à cheval dans la campagne de Beaumont. Il faisait gris. On était noyé d’humidité tombant toute droite par chute verticale, en gouttelettes, enveloppant, pénétrant l’âme et les poumons. Les cavaliers se séparèrent. Ils devaient, par des itinéraires différents, et en s’aidant de la carte, rejoindre le même point. Vincent s’enfonça dans un petit chemin creux qui descendait à pic sur un rû. De l’autre côté, une vieille ferme dressait son pignon que la bruine faisait trembler.

Cela faisait un paysage conventionnel et charmant, comme les fusains de ces albums destinés à l’étude du dessin. Maurice s’attendrit. Déjà il oubliait la théorie, les séances moroses au polygone, la voix rude de son