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Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/330

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VI

Maurice s’est guéri de sa blessure. Mais il a une jambe plus courte que l’autre. On l’a réformé avec la pension n° I. Une place dans un ministère l’aide à vivre. Tous les jours, il va à son bureau, deux heures le matin, deux heures le soir. Il porte une redingote boutonnée, un haut de forme, un parapluie. On le tient pour un employé consciencieux. Il accomplit sa tâche humaine dans le silence, et humblement, comme tout homme sur terre, porte sa croix. Il a débuté à deux mille cinq. Dans deux ans, il aura sans doute trois mille. Il peut se croire heureux. Lui-même ignore à quoi il semblait prédestiné. Il est rentré dans le rang, et il y restera. Rien n’est changé en France : il n’y a qu’un honorable fonctionnaire de plus.

Et pourtant il n’est pas guéri. La blessure n’est pas fermée. L’oiseau blessé ne se guérira pas. L’oiseau blessé ne se guérit pas. Quand il est rentré en France, il faisait le