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Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/95

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de sa batterie, d’apercevoir une silhouette connue.

C’était Maurice Vincent. Le jeune homme était vêtu d’un pantalon civil et d’un bourgeron de toile, neuf et raide, qui marquait déjà son nouvel emploi. Il se présenta au capitaine avec la gaucherie charmante d’un jeune animal maladroit. Mais cette gaucherie était telle qu’elle ne faisait que montrer mieux cette admirable chose qu’était ce jeune soldat : la pure statue de l’adolescence. Une tête brune, au regard profond et comme liquide, comme s’écoulant en nappe étendue, une expression enfantine encore, déjà énergique, des dents blanches, des cheveux frisés en broussaille, un corps élancé où l’on sentait la vigueur d’une saine jeunesse.

Timothée reconnaissait le fils de l’instituteur Vincent.

— Ah ! ça, dit-il, tu t’es engagé ici ?

— Oui, mon capitaine, pour cinq ans.

— Et… à quelle batterie es-tu affecté ?

— À la deuxième.

— Bien, tu es sous mes ordres. Nous nous reverrons. Je m’occuperai de toi. Tâche de faire un bon soldat.