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Page:Psichari - Le Voyage du centurion (1916).djvu/96

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Il sut que chaque minute pouvait souffleter un homme, à droite, à gauche, jusqu’à crier merci, aveuglé et voyant les trente-six chandelles du soleil. Il connut, l’une après l’autre, chaque minute piquante de chaque jour, l’un après l’un. Et aussi les transes des nuits sans sommeil, alors que, tourné et retourné sur sa natte comme une crêpe sur la poêle, il poussait un gémissement qui ne dépassait même pas la paroi flottante et claquante au vent nocturne. Car le vent était la vraie muraille, le séparant même de ses hommes qui étaient là, à deux pas, roulés, tête à genoux, dans la couverture de campement. En sorte que, perdu très loin de tout, sur un de ces cercles que trace le géographe sur la mappemonde et ne sachant même plus à quelle latitude il en était, sentant toute la dérision de cette mort africaine où l’on souffrait, de ce néant d’où émergeait le seul lotus