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Page:Quevedo - Don Pablo de Segovie.djvu/179

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emmitouflé dans mon manteau, et changeant de voix, me demandant moi-même en disant : « Est-ce ici que demeure le Seigneur Don Ramiro de Guzman, seigneur de Valcerrado et Vellorete ? » – « Ici demeure, répondit la jeune fille, un gentilhomme de ce nom, et d’une petite taille. » Aux indices, je témoignai que je ne doutais pas que ce ne fût lui et en conséquence je la suppliai de lui dire que Don Diégo de Solorzano, son majordome, chargé de sa recette, allait faire les recouvrements et était venu pour lui présenter ses respects. Après cela je m’en allai et un peu de temps après je retournai à la maison dans le même état que j’en étais sorti. Elles me reçurent avec la plus grande joie du monde, en me faisant des reproches obligeants sur ce que je leur avais caché que je fusse seigneur de Valcerrado et Vellorete, et elles s’acquittèrent de la commission.

Cela acheva de décider la jeune fille, qui désira d’avoir un mari si riche. Elle consentit que j’allasse lui parler à une heure après minuit par un corridor qui rendait à un toit où était la fenêtre de sa chambre. Au temps marqué, je ne manquai pas de monter au corridor pour profiter de l’occasion ; mais le diable, qui est rusé et méchant en tout, fit si bien que, quand je voulus passer au delà du toit, les pieds me manquèrent. Je tombai sur la maison d’un greffier voisin et la chute fut si violente que je cassai toutes les tuiles et qu’elles restèrent gravées sur mes côtes. Toute la maison s’éveilla au bruit, et pensant que c’étaient des voleurs, gens que ces sortes d’officiers