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Page:Quincey - Souvenirs autobiographiques du mangeur d’opium, trad. Savine, 1903.djvu/314

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DU MANGEUR D’OPIUM

Ainsi donc, Oxford, antique nourricière, et toi Cambridge, lumière jumelle de l’Angleterre, soyez vigilantes et dressez-vous, car l’ennemi est là, à vos portes. Deux siècles se sont déjà écoulés depuis que le sanglier est entré dans vos vignes pour y porter le ravage et la désolation dans votre héritage. Et cependant cet orage ne fut pas votre fin, l’éclipse ne fut point totale ! Puisse celle-ci n’être qu’une épreuve, que l’ombre jetée par le malheur ! Et que ce malheur, ô puissantes corporations, puisse être pour vous ce qu’est pour nous autres, fragiles homunculi, un moyen de purification, l’avertissement d’un oracle solennel ! Et quand ce nuage sera passé, alors, antiques puissances, relevez-vous plus sages et meilleures, prêtes comme jadis les porteurs de flambeaux, à entrer dans un nouveau stadium, et à transmettre la torche sacrée à une seconde période de deux fois cinq cents ans[1]. C’est la prière que fait un loyal alumnus, qui trouve dans son zèle et son anxiété filiale une excuse, s’il en faut une, pour prendre le ton de celui qui donne des avertissements.

Mais il faut que je revienne à la route dont cette digression m’a éloigné. Le lecteur comprendra que tout étudiant est libre d’avoir ses serviteurs à lui, d’en avoir autant, et d’aussi divers que cela lui convient. Ce point, comme plusieurs de ceux qui concernent la conduite personnelle, quand ils ne touchent en rien à la discipline publique, est de ceux auxquels ni l’université ni le collège particulier dont fait partie l’étudiant, ne se croient

  1. C’est la durée à laquelle Oxford peut prétendre, de l’aveu de tous ; quant à celle de Cambridge, elle est moins antique, ou du moins peut-être il est plus difficile d’en établir l’antiquité.