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ÉPISODES


Et le ventre poli qui s’étoile d’un signe,
Où frise le secret des laines de toisons,
Les hanches et les seins bombent sous les prisons
Des tissus palpitants dont le rêve s’indigne ;

Les robes d’or rigide où remuant d’écailles,
La soie aux plis nombreux, variés et chantants,
Et l’émail éraillé des satins miroitants,
Et la moire ridée en ondes et les failles

Qui façonnent la grâce étrange et plus hautaine
Imposent au Désir leur stérile roideur,
Et d’un mensonge encor irritant son ardeur
Voilent des nudités qui la feraient sereine.

Et, seules, attestant la blancheur des chairs mates,
Les seules mains, les mains qui n’ont jamais filé,
Sortent mystiquement le blanc charme annelé
De bagues de leurs doigts, tresseurs des longues nattes.

Mains douces ! qui cueillez sur la berge des fleuves
Les grands lis de la rive et les roseaux du bord,
Et simples ! qui puisez le baptismal trésor
Équivalent à tout le lin des robes neuves,