Aller au contenu

Page:Régnier - L’Amphisbène, 1912.djvu/197

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

resser spécialement à lui. S’il en était ainsi, je vous le dirais tout uniment, car je me sens avec vous en veine de franchise.

Plaisanterie à part, je crois que M. Delbray et moi nous sommes bien, l’un envers l’autre, en simple accord de sympathie, et encore celle qu’éprouva pour moi, à l’abord, M. Delbray fut-elle quelque peu négligente. En effet, le surlendemain de notre rencontre chez Mme Bruvannes, étant retournée quai Malaquais, j’appris que M. Delbray partait en voyage. Il allait passer une quinzaine de jours, en province, auprès de sa mère. Je vous prie de croire que cette nouvelle ne m’a nullement affectée et ne m’a causé aucune déception. Que pouvait bien m’importer l’absence de M. Delbray ? M’empêcherait-elle de visiter mes chers marchands de bric-à-brac ?

Seulement quelquefois, dans ces visites j’éprouve des difficultés. Certes, il est amusant d’acheter des vieux meubles, mais encore faut-il qu’ils ne soient pas trop neufs. Il est vrai qu’avec la foi cela revient à peu près au même. D’autre part, il est ennuyeux d’être trompée, et il faut, pour l’être le moins possible, une habitude de l’œil que je n’ai pas encore acquise. Aussi, lorsqu’au bout de la quinzaine je reçus à mon hôtel une lettre, d’ailleurs fort bien tournée, de M. Delbray, s’offrant de mettre à mon service ses faibles lumières, je ne m’avisai pas de faire la renchérie et de décliner les bons offices d’un guide aimable et informé.

Car, je vous l’affirme, mon cher Jérôme, en acceptant les propositions de M. Delbray, je pensais uniquement à ce qu’elles pouvaient avoir d’avantageux pour moi et j’agissais en parfaite égoïste. Mon acquiescement ne m’engageait à rien. Mme Bruvannes m’avait fait un vif éloge de M. Delbray. Elle m’avait vanté sa parfaite édu-