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Page:Régnier - La Canne de jaspe, 1897.djvu/13

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triangle oblique, les autres des petits tas d’ombre ébréchée. Au milieu de la place déserte une fontaine retombait dans une vasque basse. Un chien qui dormait au soleil happait une mouche au passage. Il en bourdonnait çà et là. Quelques-unes posées sur le mur y semblaient incrustées ; trois s’envolèrent du pied de biche où je sonnai.

La torpeur de la place me fit goûter la fraîcheur du vestibule. Un stuc à arabesques miroitait les murs autour d’un dallage de marbre jaune et vert. Le valet me précéda, en boitant, à travers une salle à manger où le couvert restait encore dressé. Sur une assiette d’argent des pelures de fruits se recroquevillaient. Du vin, au cristal d’un verre taillé, rougissait la nappe d’une ombre sanguine. Une odeur de piment, de sucreries et de tabac s’exhalait.

« M. le Marquis n’est pas là, dit l’homme, en soulevant une portière, je vais l’aller prévenir ; il est à son mail. »

Je me trouvai dans une longue galerie dont les portes-fenêtres ouvraient sur un jardin. D’un rosier qui devait tapisser le dehors quelques roses débordaient. Une, admirable, rouge et pompeuse, collait aux carreaux la chair délicate