Aller au contenu

Page:Rabelais marty-laveaux 02.djvu/231

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
223
chapitre xlviii

ſus le faict de leurs ceremonies & ſacrifices, attendu que leurs biens ilz deciment & roignent du guaing prouenant de leurs labeurs & ſueur de leurs mains, pour en abondance les nourrir, & entretenir. Et ne feroient (ſcelon mon iugement) tant peruerſes & impertinentes, comme celles ſont les quelles d’eulx ilz ont receup. Car (comme treſbien auez dict) loy on monde n’eſtoit, qui es enfans liberté de foy marier donnoit, ſans le ſceu, l’adueu, & conſentement de leurs peres. Moyenantes les loigs dont ie vous parle, n’eſt ruffien, forfant, ſcelerat, pendart, puant, punais, ladre, briguant, voleur, meſchant, en leurs contrées, qui violentement ne rauiſſe quelque fille il vouldra choiſir, tant ſoit noble, belle, riche, honeſte, pudicque, que ſçauriez dire, de la maiſon de ſon pere, d’entre les bras de ſa mere, maulgré tous ſes parens : ſi le ruffien ſe y ha vne foys aſſocié quelque Myſte, qui quelque iour participera de la praye. Feroient pis & acte plus cruel les Gothz, les Scythes, les Maſſagettes en place ennemie, par long temps aſſiegée, à grands frays oppugnée, prinſe par force ? Et voyent les dolens peres & meres hors leurs maiſons enleuer & tirer par vn incongneu, eſtrangier, barbare, maſtin tout pourry, chancreux, cadauereux, paouure, malheureux, leurs tant belles, delicates, riches, & ſaines filles, les quelles tant cherement auoient nourriez en tout exercice vertueux, auoient diſciplinées en toute honeſteté : eſperans en temps oportun les colloquer par mariage auecques les enfans de leurs voiſins & antiques amis nourriz & inſtituez de meſme ſoing, pour paruenir à ceſte felicité de mariage, que d’eulx ilz veiſſent naiſtre lignaige raportant & hæreditant non moins aux meurs de leurs peres & meres, que à leurs biens