Aller au contenu

Page:Rabelais marty-laveaux 02.djvu/272

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
264
prologve

& iectez es pieds de Couillatris troys coingnees : la ſienne, vne aultre d’or, & vne tierce d’argent maſſiues toutes d’vn qualibre. Luy ayant baillé l’option de choiſir, s’il prend la ſienne & s’en contente, donnez luy les deux autres. S’il en prend aultre que la ſienne, couppez luy la teſte auecques la ſienne propre. et deſormois ainſi faictes à ces perdeurs de coingnee. Ces parolles acheuees Iupiter contournant la teſte comme vn cinge qui aualle pillules, feiſt vne morgue tant eſpouuantable, que tout le grand Olympe trembla.

Mercure auecques ſon chappeau poinctu, ſa capeline, talonnieres & caducee ſe iecte par la trappe des Cieulx, fend le vuyde de l’air, deſcend legierement en terre : & iecte es pieds de Couillatris les trois coingnees : Puys luy dict. Tu as aſſés crié pour boire. Tes prieres ſont exaulcees de Iuppiter. Reguarde laquelle de ces troys eſt ta coingnee, & l’emporte. Couillatris ſoublieue la coingnee d’or : il la reguarde : & la trouue bien poiſante : puis dict à Mercure. Marmes[BD 1] ceſte cy n’eſt mie la mienne, Ie n’en veulx grain. Autant faict de la coingnée d’argent : & dict : Non eſt ceſte cy. Ie la vous quitte. Puys prend en main la coingnee de boys : il reguarde au bout du manche : en icelluy recongnoiſt ſa marque : & treſſaillant tout de ioye, comme vn Renard qui rencontre poulles eſguarees, & ſoubriant du bout du nez dict. Merdigues[BD 1] ceſte cy eſtoit mienne. Si me la voulez laiſſer, ie vous ſacrifiray vn bon & grand pot de laict tout fin couuert de belles frayres aux Ides (c’eſt le quinzieme iour) de May[BD 2]. Bon homme, diſt Mercure, ie te la laiſſe, prens la. Et pour ce que tu as opté & ſoubhayté mediocrité en matiere de coingnee, par le vueil de Iuppiter ie te donne ces deux aultres. Tu

  1. a et b Marmes. Merdigues. iuremens de gens villageoys en Touraine
  2. Ides de May. esquelles naſquit Mercure