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le qvart livre

cens ſix hommes de guerre tous parens, auecques cinq mille aultres ſoubdars tous leurs vaſſaulx : qui tous feurent occis, ce feut près le fleuue Cremere, qui ſort du lac de Baccane. De ceſte terre pour vn beſoing ſortiront plus de trois cens mille tous parens & d’une famille.

Leurs parentez & alliances eſtoient de façon bien eſtrange. Car eſtans ainſi tous parens & alliez l’un de l’aultre, nous trouuaſmes que perſone d’eulx n’eſtoit pere ne mere, frere ne ſœur, oncle ne tante, couſin ne nepueu, gendre ne bruz, parrain ne marraine de l’aultre. Sinon vrayment vn grand vieillard enaſé lequel, comme ie veidz, appella vne petite fille aagée de trois ou quatre ans, mon père : la petite fillette le appelloit ma fille. La parenté & alliance entre eulx, eſtoit que l’un appelloit vne femme, ma maigre[1] : la femme le appelloit mon marſouin, Ceulx là (diſoit frere Ian) doiburoient bien ſentir leur maree, quand enſemble ſe ſont frottez leur lard. L’un appelloit vne guorgiaſe bachelette en ſoubriant. Bon iour mon eſtrille. Elle le reſalua diſant. Bon eſtreine mon Fauueau. Hay, hay, hay, s’eſcria Panurge, venez veoir vne eſtrille, vne fau, & vn veau, N’eſt ce Eſtrille fauueau[2] ? Ce fauueau à la raye noire doibt bien ſouuent eſtre eſtrillé. Vn autre ſalua vne ſiene mignonne diſant. A dieu mon bureau. Elle luy reſpondit. Et vous auſſi mon proces. Par ſainct Treignan (diſt Gymnaſte) ce proces doibt eſtre ſouuent ſus ce bureau. L’un appelloit vne autre mon verd. Elle l’appelloit, ſon coquin. Il y a, bien là, diſt Euſthenes, du Verdcoquin. Vn aultre ſalua vne ſienne alliee diſant. Bon di, ma coingnee[3]. Elle reſpondit. Et à vous mon manche. Ventre beuf, s’eſcria Carpalim, comment ceſte coingnee eſt em-

  1. Maigre. Il s’agit ici du poisson appelé sèche ou ombre. Ce chapitre ne se compose presque que de jeux de mots assez fades et très libres.
  2. N’eſt ce Eſtrille fauueau ? « C’est ici l’ame du vieux rebus composé d’une étrille, d’une faulx & d’un veau… On le trouve dans ces vers de Marot, qui font de sa 2. Épître du Coq à l’âne :

    Vne eſtrille, vne faulx, vn veau,
    C’eſt à dire eſtrille Fauueau,
    En bon rebus de Picardie.

    Mais Durand Gerlier, Libraire à Paris, se l’étoit approprié avec la Devise dès l’an 1489. Voiez la Caille, Hist. de l’Imprimerie, p. 65. » (Le Duchat)

  3. Ma coingnee. Voyez les équivoques du même genre, t. II, p. 262 et 263.